La forme spirituelle du jeûne : Ibn arabi

Publié le par Editions Le Souffle Divin

Sache – qu’Allah te secoure ! - que le jeûne, c’est l’abstinence et l’exaltation. On dit du jour qu’il «jeûne» (sâma) lorsqu’il culmine. Imru-l-Qays a dit: «Lorsque le jour s’éloigne et jeûne», c’est-à-dire lorsqu’il atteint son sommet. Le jeûne a été appelé ainsi parce qu’il s’élève en degré au-dessus de toutes les autres oeuvres d’adoration. Il l’a élevé -gloire à Sa transcendance - en niant toute ressemblance entre lui et ces oeuvres.» Nasâ’î rapporte cette parole d’Abû Umâma : «Je m’approchai de l’Envoyé d’Allâh (saw) et lui dis : «Donne-moi un ordre que je prendrai directement de toi !» Il répondit: «Adonne-toi au jeûne, car il n’a pas de semblable». Le Très-Haut a dit à Son propre sujet : «Rien ne Lui est semblable». Le jeûne n’est pas un acte mais l’abandon d’un acte. La négation de toute ressemblance est elle-même un attribut négatif, ce qui renforce l’analogie entre le jeûne et Allah.

C’est Allah qui est le Prix du jeûne quand le jeûneur retourne vers son Seigneur et le rencontre avec la qualification «Rien ne Lui est semblable», c’est-à-dire avec le jeûne. En effet, ne peut contempler «Celui à qui rien n’est semblable» que «celui à qui rien n’est semblable». Le jeûne appartient au serviteur par statut, non par son essence. Allah Se l’est attribué et en a dépouillé le jeûneur, bien qu’Il lui ait donné l’ordre de jeûner. Il convient donc que le jeûneur regarde vers son Seigneur durant toute la durée de son jeûne afin de réaliser pleinement sa qualification et de ne pas en être diverti. Allah ne S’attribue le jeûne que s’il est authentique; il ne l’est que dans la forme qu’Allah a prescrit au jeûneur de réaliser. Si ce dernier ne jeûne pas de la manière qui a été définie par la Loi, il n’est pas jeûneur et, en ce cas, il n’y a pas de jeûne qu’Allah puisse lui «rendre». ll peut se faire en effet que le jeûneur imagine être tel alors qu’il accomplit pendant le temps de son jeûne des actes qui le disqualifient comme la calomnie : en ce cas, il rompt son jeûne bien qu’il s’abstienne de manger; pour qu’il retrouve sa qualité de jeûneur, il faut qu’il y ait expiation. Que le jeûneur soit attentif à ce point, car il s’agit de préférer Allah à soi-même. Il sera récompensé alors à la mesure de Celui qu’il aura préféré, c’est-à- dire Allah le Très-Haut. Celui qui demeure attentif à son Seigneur, Allah le Très-Haut demeure attentif à lui de sorte qu’il n’a d’autre récompense que Lui : «Celui dans le sac duquel Il a été trouvé, c’est Lui qui en paie le Prix !» (Cor.12, 75). Or, le Vase d’or du Roi est effectivement trouvé dans le sac ; d’un côté, Allah est présent dans le «coeur» de Son serviteur croyant qui se tient avec Lui ; de l’autre, le jeûne se trouve chez Allah car c’est à Lui qu’il appartient quand il est valide. Le jeûneur cherche alors son sac et on lui dit : «C’est Allah qui l’a pris !» Allah devient ainsi Lui-même le Prix (de cet autre rapt) conformément à Sa Parole : «Le jeûne est à moi, et c’est moi qui en paie le Prix».
Ibn Arabî, "Les secrets du jeûne" (extraits de "Textes sur le jeûne" traduits par 'Abd ar-Razzâq Yahyâ).

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